Avec le mercredi revient souvent l'angoissante et
récurrente question : comment occuper les enfants ? Mais à propos,
doit-on les occuper à tout prix ?Et quelle place les loisirs doivent
tenir dans leur vie ? Analyse, réponses d'enfants et interview d'Etty
Buzyn, psychanalyste, auteur de "Papa, maman, laissez-moi le temps de
rêver"
Mère, grand-mère, et psychanalyste spécialiste des
enfants, Etty Buzyn a travaillé aux côtés de Françoise Dolto. Elle fait
le constat suivant : l'enfant est de plus en plus reconnu comme une
personne, mais il est trop souvent pris pour une grande personne.
Dans "Papa, maman, laissez-moi le temps de rêver",
Etty Buzyn dénonce la course à la performance qui envahit même les loisirs et le temps libre des enfants.
Or, pour elle, comme pour de nombreux psy, les enfants ont besoin de
périodes d'inactivité. De temps vraiment libre pour jouer, rêver,
développer leur imaginaire et leur créativité.
"Plutôt que de "gérer le temps de son enfant",
mieux vaut peut-être lui permettre de le gérer lui-même : c'est-à-dire
qu'il puisse apprendre à se satisfaire de ses propres ressources... à
condition que l'adulte soit accessible. Il ne s'agit pas de le laisser
livré à lui-même. La disponibilité de l'adulte est indispensable aux
enfants et tout autant aux adolescents.
L'écueil à éviter, c'est
surtout de submerger l'enfant d'activités. Aujourd'hui, on voit des
enfants craquer parce qu'ils ont un emploi du temps de petits PDG : ils
passent sans temps mort d'une activité à une autre et ne rêvent que
d'une chose : pouvoir jouer tranquillement, rêver, ne rien faire. Or,
ces moments d'inactivité et même d'ennui sont nécessaires à la
construction de l'enfant : ils lui permettent de "s'écouter",
d'imaginer, de créer son propre univers, donc de développer sa propre
créativité et son autonomie..."
"Aujourd'hui, on exige souvent trop et beaucoup
trop tôt des enfants : lecture précoce, ateliers en tous genres… On ne
sait quoi inventer pour occuper les petits et surtout, les rendre plus
performants ! En fait,
on oublie le jeu libre, le jeu pour le jeu et on privilégie les activités stimulantes, en un mot "rentables". Tout se passe comme si, dès la maternelle et même avant, l'éducation devait déjà répondre aux intérêts économiques.
Et
les enfants se soumettent à la pression de leurs parents ou des
éducateurs, non par goût mais par peur de n'être plus aimés. Mais à
force de pousser, de stimuler, d'anticiper les stades du développement
de l'enfant, on produit l'effet inverse.
On brime l'imagination des enfants et donc leur capacité à innover et à s'adapter. Et à terme, on en fait des adultes à la fois stressés et manquant d'initiatives."